Six ans après, la bourse efface la crise

SIX ANS APRÈS, LA BOURSE EFFACE LA CRISE

 

Moins de six années après la chute de la banque d’affaires Lehman Brothers et le mini-krach boursier qui s’ensuivit, la capitalisation boursière des principales entreprises françaises a renoué avec les sommets qu’elle tutoyait avant la crise.
Quatre mille trois cents points, c’est le niveau atteint par le Cac 40 la semaine dernière. Ce niveau n’avait pas été dépassé depuis la mi-septembre 2008. Or c’est le 15 septembre 2008 que s’effondrait Lehman Brothers. L’un des acteurs majeurs de l’économie financiarisée faisait faillite à la suite de la crise des subprimes, initiée un an plus tôt. La chute de Lehman Brothers a fait sombrer la Bourse américaine puis, quelques semaines plus tard, les Bourses mondiales. Pour pallier la crise, certains États ont nationalisé les pertes subies par les banques, garantissant les épargnes et allant même jusqu’à racheter des actifs toxiques. Le journal Le Monde, daté du 27 octobre 2008, estimait alors que 25.000 milliards de dollars de capitalisation boursière avaient disparu, soit la perte de presque la moitié de la capitalisation des grandes places financières.

En moins de six mois, les sociétés du Cac 40 avaient en moyenne perdu 41% de leur valeur. Mais rapidement la faillite du système bancaire s’est, comme par magie, transformée en crise de l’endettement des États. Aucun rapport, évidemment, avec le fait que ces mêmes États avaient dû pallier les inconséquences et irresponsabilités du monde bancaire en renflouant aveuglément leurs tonneaux des Danaïdes.

La crise actuelle profite avant tout aux plus riches des plus riches

Si les rentiers dont le capital était composé d’actions ont vu diminuer leur patrimoine en quelques mois, ils ont pourtant rapidement renoué avec une meilleure fortune dans la mesure où les cinq années suivantes, leur portefeuille a connu une progression moyenne de 7% par année. Mais cette progression a un prix car bien souvent ce sont les annonces de plans sociaux, de restructuration ou de réorganisation qui génèrent des hausses brutales des cours de ces entreprises. Ainsi le retour à ce niveau de capitalisation a un prix social dramatique, en France et dans le reste de l’Europe. En effet dans cette période faste pour les boursicoteurs, le chômage a été multiplié par trois en Espagne ou en Grèce. Il a doublé en Italie, au Portugal ou aux Pays-Bas. En France il est passé de 8,3% à 10,9% de la population, soit une progression de près de 25%.

Et si la Bourse a renoué avec ses niveaux de 2008, la crise actuelle profite avant tout aux plus riches des plus riches. Une ONG a ainsi établi dans un récent rapport que si, en 2006, 2% de la population mondiale possédait 50% des richesses mondiales, en 2013 ce n’est plus que 1% de la population mondiale qui possède la moitié de ces richesses. Une brutale et forte concentration, confirmée par le mensuel Challenge en octobre 2013. Ce journal économique, qui tient annuellement le palmarès des cinq cents premières fortunes françaises, a montré que le patrimoine de ces cinq cents privilégiés a progressé de 25% en 2012, atteignant 330 milliards d’euros.

De leur côté, les entreprises du Cac 40 ont distribué entre 35 et 41 milliards d’euros de dividendes chaque année entre 2007 et 2012. En 2012, ArcelorMittal aura versé 910 millions d’euros de dividendes, alors que le groupe a perdu près de 3 milliards d’euros. Mais le gouvernement laisse fermer Florange. Il persiste à vouloir s’en prendre à un hypothétique coût du travail, plus communément appelé salaires. Le montant des dividendes versés, leur impact croissant sur le résultat des entreprises, la déconnexion entre ces montants et l’état de ces mêmes entreprises démontrent que le problème se situe probablement plus au niveau du coût de plus en plus exorbitant du capital et de ses détenteurs.

Date de dernière mise à jour : 05/07/2021